Marseille, Théâtre de l’Odéon:”Paganini”

Marseille, Théâtre de l’Odéon, saison 2023/2024
“PAGANINI”
Opérette en 3 actes, livret de Paul Knepler et Béla Jenbach
Musique Franz Lehár
Anna Elisa PERRINE MADOEUF
Bella JULIE MORGANE
La Comtesse de Laplace/Caroline CECILE GALOIS
Anita SABRINA KILOULI
Paganini SAMY CAMPS
Bartucci JEAN-CLAUDE CALON
Pimpinelli FABRICE TODARO
Beppo/Marco PHILIPPE BERANGER
Le Général d’Hedouville JEAN-LUC EPITALON
Le Prince Felice JORIS CONQUET
Foletto/Emmanuel DOMINIQUE DESMONS
L’Aubergiste/1er Gendarme ANTOINE BONELLI
2ème Gendarme DAMIEN BARRA
Le Violon de Paganini ALEXANDRA JOUANNIE
Orchestre de l’Odéon
Chœur Phocéen
Direction musicale Frederico Tibone
Chef de chœur Rémi Litolff
Chorégraphie Anne-Céline Pic-Savary
Mise en scène Carole Clin
Décors Loran Martinel
Costumes Opéra de Marseille
Marseille, le 24 février 2024
Depuis quelques années déjà, le Théâtre de l’Odéon est devenu, à Marseille, le temple de l’opérette. Décrié depuis quelques décennies maintenant cet art lyrique est dans cette ville une tradition et fait salle comble à chaque spectacle donné 2 fois ; et nous sommes les premiers à applaudir. En cet après-midi du 24 février Franz Lehár allait enchanter le public avec son opérette Paganini. Et, comme toujours avec ce compositeur, fraîcheur, légèreté et musicalité seraient au rendez-vous dans la mise en scène efficace et raffinée de Carole Clin. Rendant les atmosphères avec peu de choses et laissant évoluer les artistes avec simplicité et élégance, la metteur en scène a quelques idées qui ravissent l’œil tel Paganini  jouant du violon en ombres chinoises en haut d’un grand escalier, se détachant sur le bleu profond du ciel. Un superbe effet ! Des passages amusants finement réglés apportent une certaine crédibilité à cette histoire amoureuse. Les décors de Loran Martinel nous font passer d’une place de village dans un salon princier par un jeu de lustres à pampilles pour finir dans un cabaret haut en couleurs tenu par des bohémiens. Une certaine simplicité dans tout cela rendue crédible par la beauté des costumes “empire” venus de l’Opéra de Marseille. Nous sommes dans la campagne toscane où la Princesse de Piombino et de Lucca est séduite par les sons mélodieux du violon de Paganini. Cette princesse Anna Elisa, amateur d’art et de politique, un peu volage, s’éprendra tant de son violoniste que son frère, l’empereur Napoléon 1er, prenant ombrage de son installation à la cour lui intimera l’ordre de le renvoyer hors de la principauté sous peine d’être arrêté. Evidemment intrigues, trahisons et jalousie seront au rendez-vous, ponctuées d’airs connus que l’on goûte telles des friandises. Samy Camps est donc ce Paganini qui fait tourner les têtes des jeunes filles lui-même n’étant pas insensible à leurs charmes. A l’aise dans ses évolutions, sa voix puissante séduit autant que le son de son violon et nous donne à écouter de jolis duos avec Anna Elisa “Mon désir te suit sans trêve…” mais, c’est dans son air “J’ai toujours cru qu’un baiser…” tendre et sensuel qu’il séduit le plus. Conquise, La Princesse de Piombino l’est dès la première note, le premier regard. La voix cristalline de Perrine Madoeuf traduit bien ses états d’âme, passant de la joie amoureuse aux affres de la jalousie. Le timbre est chaleureux avec des aigus purs et puissants chantés dans un phrasé musical. Elle émeut, séduit “Quel berceau fut le mien…” si la joie lui va bien, le timbre de sa voix peut aussi devenir plus grave “Non, non, je ne peux pas y croire…”. Une Anna Elisa de grande classe à l’élégance naturelle. Julie Morgane prête sa voix de soprano à Bella, coquette, légère, volage qui préfère le charme de Paganini au Prince Felice mais finira par partir au bras de Pimpinelli avec qui elle chante de jolis duos sur quelques pas de danse. De jolis moments musicaux. Une Bella qui inspire Pimpinelli alors qu’il chante “Bella…”, dans cette voix de baryton martin qui caractérise Fabrice Todaro et qui lui autorise aussi bien quelques aigus que des graves timbrés. Amusant toujours dans son jeu ou dans son chant “Belles brunes et blondes…” entraînant. Une distribution homogène et bien choisie avec le Bartucci amusant et juste dans l’interprétation de Jean-Claude Calon, le Prince Felice dans la voix grave et projetée de Joris Conquet, la voix timbrée de mezzo de Cécile Galois pour des rôles de compositions amusants (La Comtesse de Laplace/Caroline) ou l’Anita de Sabrina Kilouli. Chaque rôle est juste sans jamais forcer le trait. Jean-Luc Epitalon (Général d’Hedouville) ou Beppo et Marco de Philippe Béranger. Il faut citer aussi Dominique Desmons Foletto/EmmanuelL’Aubergiste et le 1er Gendarme d’Antoine Bonelli et le 2ème Gendarme de Damien Barra. Une équipe homogène qui anime la scène, avec aussi le joli ballet dans la chorégraphie d’Anne-Céline Pic-Savary. Le Chœur Phocéen n’est pas non plus en reste. Bien préparé par Rémi Litolff il joue, chante et danse parfois avec aisance, implication et unité des voix. L’on remarque l’engagement et les belles sonorités de l’orchestre qui change de style avec souplesse, qu’il accompagne les chanteurs dans des phrases viennoises ou qu’il sonne avec plus de brio dans le ballet, dirigé avec intelligence et musicalité par Frederica Tibone. Mais la grande vedette de cette opérette n’est-elle pas Le violon de Paganini Alexandra Jouannie fait vibrer ce violon dans des envolées sentimentales ou des morceaux de bravoure qui allient technique, vélocité et musicalité à rendre tous les cœurs amoureux. Un grand bravo à la violoniste qui donne une grande partie de son charme à l’ombrageux Paganini. Un après-midi de musique et de légèreté qui a, comme toujours, séduit le public. Photo Christian Dresse