Opéra de Toulon, Saison 2014
“MACBETH”
Melodramma in quattro atti, libretto di Francesco Maria Piave, dall’omonima tragedia di William Shakespeare
Musica di Giuseppe Verdi
Macbeth GIOVANNI MEONI
Banco MIKHAIL KOLELISHVILI
Lady Macbeth INGELA BRIMBERG
Dama di Lady Macbeth AURÉLIE LIGEROT
Macduff ROMAN SCHULAKOFF
Malcolm GIORGIO TRUCCO
Medico ANTOINE ABELLO
Sicario JEAN-FRANÇOIS VERDOUX
Orchestre et Coeur de l’Opéra de Toulon
Direction musicale Giuliano Carella
Mise en scène Jean-Louis Martinoty
Décors Bernard Arnould
Costumes Daniel Ogier
Lumières François Thouret
Vidéos Gilles Papain
Toulon, 27 avril 2014
En ce dimanche après-midi, nous assistions à une représentation de Macbeth, l’un des plus beaux opéras de Giuseppe Verdi, dans le joli Théâtre de l’Opéra de Toulon. Giuseppe Verdi, après avoir écrit une première version de cet opéra, qui sera créé à Florence en 1847, apportera quelques modification pour une reprise au Théâtre Lyrique de Paris en 1865, introduisant un ballet ( sans lequel aucun opéra ne pouvait être représenté avec succès sur les scènes parisiennes à cette époque ), et un grand choeur final. Ce n’est pas cette version qui nous est donnée à voir aujourd’hui et voilà pourquoi nous n’aurons pas de choeur final. Giuseppe Verdi, qui vient après Rossini, Bellini et Donizetti, apporte une force dramatique dans la musique et les voix, qui n’existait pas jusque là. En abordant les pièces de William Shakespeare, le compositeur introduit la dramaturgie du Théâtre français, reprenant la structure des grands auteurs classiques, assez éloignée du théâtre élisabéthain qui mêle souvent comédie et tragédie ; et tout en gardant le côté violent et sanglant qui caractérise le théâtre Shakespearien, il en ôte le côté grossier que l’on trouve quelquefois dans ces pièces.
La mise en scène a été confiée à Jean-Louis Martinoty, administrateur de l’Opéra de Paris de 1986 à 1989. Il nous livre ici une mise en scène assez claire et assez classique. La dramaturgie est respectée et les acteurs sont bien dirigés ; la seule fausse note, à notre avis, qui n’apporte rien au dramatique de l’ouvrage mais crée un malaise visuel, est ce court ballet des elfes, représentées par des monstres de chair rose à plusieurs bras et plusieurs têtes, qui nous font penser à cet immonde foetus sortant d’un oeuf, entrevu dans le Lohengrin présenté au festival de Bayreuth en 2011. L’évocation des personnages assassinés qui sortent de terre ou de la table du banquet est un passage sanglant et laid dont on pourrait se passer, ainsi que des cadavres qui sont présentés en avant scène. Mais à part cela, le metteur en scène a essayé, sans grande imagination, de rester au plus près du livret.
Bernard Arnould, a imaginé les décors. Sobres et adaptés à l’ouvrage, ils demanderaient sans doute une plus grande scène pour prendre toute leur dimension. De hautes colonnes mobiles à effets de miroirs s’ajustent pour les besoins de la mise en scène, une immense table suspendue par des filins meuble le plateau pour le banquet, c’est bien pensé et peut tout à fait convenir à cette période où le mobilier devait être rustique. Habitué des grands espaces tels que Vérone ou Orange, on sent que Bernard Arnould est ici un peu à l’étroit, mais il réussit à créer cette atmosphère de noirceur et d’angoisse qui règne tout au long de l’ouvrage.
Les costumes de Daniel Logier reflètent l’époque médiévale, avec des tissus et des couleurs qui mettent un peu de lumière dans ce sombre drame. Les sorcières sont habillées de façon imagée. Druidesses en robes longues bicolores blanc et noir côté pile, elles se font sorcières aux visages de mort dès qu’elles se tournent côté face, c’est très bien imaginé, et enlève un peu le côté sordide des affreuses sorcières que l’on a l’habitude de voir. Lady macbeth, est vêtue d’une robe de soirée verte, seule couleur qui tranche vraiment. On ne comprend pas bien ce choix, sourtout lorsque l’on sait que le vert était proscrit dans les théâtres, et qu’à une certaine époque aucune cantatrice n’aurait accepté de porter une telle couleur (autres temps, autres moeurs..). Parée d’une longue chevelure, elle arrive plus tard les cheveux courts, pour aborder la scène de somnambulisme avec de longs cheveux blancs. Les lumières de François Thouret sont moins convaincantes, nous laissant souvent dans l’obscurité malgré quelques éclairages indirects bien pensées. L’ensemble scénique, bien que sans grande innovation, est cohérent et mis au service de l’oeuvre.
Giovanni Meoni est un Macbeth tout à fait correct, s’il ne possède pas une voix assez large et profonde pour ce rôle, il n’en possède pas moins un timbre agréable et une bonne technique qui lui permettent de nous donner de beaux moments et de nous faire entendre un joli duo avec Lady Macbeth. Il a cette bonne projection qui donne de la force à la voix, mais c’est certainement la présence qui lui manque le plus, sa voix passerait sans doute mieux avec un plus grand investissement dramatique. Son Air “Pietà, rispetto, amore”, du 4ème acte manque de puissance, mais il est chanté avec musicalité. Giovanni Meoni est sensiblement mieux à partir du 3ème acte et meurt d’une façon crédible.
Ingela Brimberg, plus investie dans son rôle, joue mieux. Elle a de l’allure et une présence qui donnent une certaine force à son personnage, mais sa voix de soprano n’est ni assez dramatique, ni assez large, elle nous paraît un peu un peu dépassée par le poids de cette Lady Macbeth. Giuseppe Verdi désirait que ce rôle ne soit pas chanté par une trop belle voix, il désirait une voix adaptée à ce terrible personnage par qui tout ce drame arrive, une voix rude, puissante et éclatante, et malgré de bons moments, malgré quelques passages qui paraissent lui convenir, ce rôle est un peu écrasant pour la voix d’Ingela Brimberg.
Mikhail Kolelishvili, est un Banco un peu faible vocalement, mais il réussit à donner de la force à ce rôle et a se faire remarquer. Le ténor Roman Shulackoff nous paraît plus investi vocalement et dramatiquement. Il chante Macduff avec personnalité, faisant sonner sa voix de ténor bien placée. Son Air, bien projeté est chanté dans la tradition italienne. Il joue avec sobriété, rendant son rôle très présent. Le ténor Giorgio Trucco, malgré un rôle des plus courts, interprète Malcolm avec force. Tous les seconds rôles sont bien. Investis, avec des voix adaptées, ils participent au succès de l’ouvrage.
Le Choeur, fait ici une bonne prestation, avec des attaques nettes et des voix homogènes. Les parties de choeur sont toujours très bien écrites dans les opéras de Verdi, elles sont chantées ici avec force ou, de façons plus nuancées, mais toujours avec musicalité. Le grand vainqueur de cette représentation est sans conteste l’orchestre, dirigé par un Giuliano Carella en grande forme. Il soutient ses tempi, garde la tension qui, dès le début de l’ouvrage tient le public dans une certaine forme d’angoisse. Les couleurs dont respectées, dans les sons stridents qui appellent les sorcières, dans les nuances piani, qui soutiennent les chanteurs ainsi que dans les belles phrases écrites pour orchestre seul. Il dirige d’une baguette ferme et énergique dans un grand respect du texte et des voix, sans recherche d’effet superflu. Une bonne représentation pour un ouvrage très lourd à monter. Photo Frédéric Stéphan